Caractères fondamentaux du droit yssois (1)

6 Mars An IV PSD — Anaclet de Paxatagore

Mesdames, Mesdemoyselles, Messieurs,

Le développement actuel du droit et des juridictyons de Venys exigent que l’on fasse le point sur les caractères du droit yssois tradytionnel, qui est de plus en plus méconnu par nos élites. A preuve, le fait que notre Subliminale Dogitude, Théophraste de Mytilène, pourtant brillant avocat yssois, ignorait que toutes les décysions dogéales étaient soumyses au contrôle juridyctionnel de nos Tribunaux.

Le caractère premier, fondamental, essentiel du droit yssois est son caractère jurysprudentiel. Yssu de la tradytion des Cours Impériales, il fonctyonne essentiellement par le mécanysme de "l’actyo in curia".

L’actyo in curia

L’actyo in curia est un vieux mécanysme yssois. Lorsqu’une personne a un reproche à formuler envers quelqu’un d’autre, il peut porter devant une cour (Curia) son litige. Il doit cependant le faire dans des formes précyses et déterminées par la tradytion. Ces formes sont destinées à la protectyon des libertés individuelles. Il doit donc rédiger une "Actyo in curya" (actyon devant la Cour), dans les formes prescrites. Il exyste plusieurs types d’actyo in curia, chacun déterminant la saysie d’une Cour différente. Ainsy, l’actyo "feodalys rumpys", portée devant la Chambre des Payrs, était la formule qui permettait à un vassal d’obtenir la rupture de son lien de vasselage avec son seigneur. L’actyo "feodalys executyo", portée devant la Cour Féodale, était au contraire la formule qui permettait à un suzerain d’obtenir la condamnatyon de son vassal à exécuter ses obligatyons. Et ainsy de suite...

Lorsqu’un seigneur ou l’Empereur établyssait une Cour, il créait l’actyo ou les actyos qui permettaient à ses sujets de la saysir. Ensuyte, chaque Cour établyssait généralement le régime de son actyon et les condytions dans lesquelles elle faysait droit ou non à la demande. De là provient la dyspersyon du droyt yssois en de multiples règles de procédures qui priment sur le fond : à chaque litige son actyo, à chaque actyon son régime applicable.

Cette situatyon reflétait également les divergences et les jeux de pouvoirs entre les différents seigneurs. Ainsy, les Métaligore de Mytilène entretenirent jusqu’à 122 Cours différentes, chacune composée de troys ou quatre Juges, pour faire face aux litiges qui nayssaient entre leurs sujets. C’était là une évidente course au prestige, puysque l’Empereur, à cette époque, n’en avaient que 89 et les Paxatagore 68.

Toutefoys, l’éparpillement des régimes juridiques qui s’ensuivirent fut combattu par l’Universyté de Droit de Venys, créée par l’Empereur pour cela. Les jurystes et légystes de l’Universyté tentèrent de cerner les règles générales au dessus des règles particulières. Ils apportèrent leur contributyon à une tentative d’explicatyon scientifique du droit yssois. Sans grand succès. Au contraire, ils se déchirèrent en écoles et courants, à chercher yci ou là à interpréter tel ou tel décysion dans leur sens.

Dans ce fatras de décysions diverses, les seigneurs, les villes et l’Empereur tentèrent également de jouer de leur influence. Ainsy, les Bulles Impériales, les Edyts, les Ordonnances, les Délibératyons des Villes Franches, les Avys, les Adjonctyons des Seigneurs venaient apporter des expeptyons aux règles de la jurysprudence, au lieu d’apporter de la clarté.

Tentons un exemple, qui nous attirera nécessairement les foudres de telle ou telle école. Le cas de la prescriptyon de l’actyo de propryo. L’actyo de propryo est l’actyon dont dyspose un fermier pour revendiquer une terre qui serait la sienne et qui est occupée sans titre par d’autres.

Cette actyon fut introduite en droit yssois en 1475 par l’Archimandrite Palymperos, qui fonda pour la faire vivre la Curya Ecclesya de Propryo (Cour Ecclesyastique de Proprio), située dans l’aile droite du Palays Archymandrital. Lors d’un conflit surgy en 1543, l’un des défendeurs opposa la prescryption de l’actyon : selon lui, on ne pouvait mettre en oeuvre l’actyo de propryo lorsque l’occupant sans titre occupait depuys plus de 5 ans. Un long débat s’ensuivit. Finalement, les juges estimèrent que la prescriptyon de l’actyon de proprio était de 7 ans.

Cependant, le Métaligore de Mytilène décréta que sur ses terres, elle serait de 15 ans. L’Empereur décréta également que pour son domaine privé, la prescriptyon qui lui serait opposable serait de 2 ans (afin de protéger ses terres contre d’autres). Et la Ligore Tinùviel fonda sa propre Curya de Propryo : la Curya Tinùvielys de Propryo in Sacrementel. Cette Curya dysposait de sa propre actyon, l’actyo de proprio in sacramentel, calquée sur l’actyo de proprio, mays n’était applicable qu’aux terres "in sacramentel", régime juridique spécifique de possessyon religieuses, qui n’exystait que sur certaines terres des Tinùviel. Devant la Curya Tinùvielys de Propryo in Sacramentel, il était explicitement prévu une prescriptyon de 4 ans.

Aussy, les plaideurs qui possédaient une terre "in sacramentel" avaient 4 ans pour aller plaider devant la Curya Tinùvielys. Au delà de ces 4 ans, ils pouvaient tout de même aller devant la Curya Ecclesya de Propryo, où la prescriptyon était de 7 ans et non de 4. L’on mesure à cet exemple (extrêmement simple par rapport à bien d’autres) à quel point le système de l’actyo entrainait une grande complexité.

Les réformes récentes

Cependant, des réformes récentes ont permys un début de simplificatyon. La plus importante a été bien sur l’Edit sur la Justyce, en 1867. Cette année, le Conseil des Portes décida la fusyon de toutes les cours impériales de Venys en une seule Cour Impériale d’Appel, avec une actyon unique : l’actyo de appelys. L’actyon de appelys permettait à tout plaideur mécontent d’une décysion rendue par n’importe quelle juridictyon de venir devant la Cour Impériale, qui pouvait réformer ou annuler la décysion attaquée. La créatyon d’une juridictyon unique d’appel permys une certaine simplificatyon.

La seconde réforme fut celle de 1931, date à laquelle toutes les juridictyons religieuses, féodales et urbaines furent supprimées. Désormays, le territoire impérial, qui était assez réduit au demeurant, fut couvert par des Tribunaux Impériaux d’Ynstance, devant lesquelles TOUTES les actyons étaient portées. C’était une révolutyon ! Alors qu’auparavant chaque actyon avait son tribunal, désormays, toutes les actyons étaient portées devant un seul tribunal. C’était là un changement majeur, et vécut comme telle. Selon certains auteurs doctrinaux, c’était la mort du droit yssois.

En 1948, ces tribunaux d’instance reçurent une procédure unique. En effet, auparvant, chaque actyon avait gardé sa procédure, malgré l’unificatyon des juridictyons. Parfoys, la procédure était restée très archaïque. Ainsy, dans l’actyo de probatyonnis de virgynitas, action par laquelle un Seigneur ou le Maire d’une ville pouvait forcer un Père de famille à envoyer sa fille à la fête de la Défloratyon parce qu’elle était encore vierge et avait atteint l’âge pour aller à la fête, la fille en questyon devait prouver sa virginité de façon très spectaculaire, devant tout le village ou l’assemblée de la ville.

Enfin, la réductyon de l’Empire en peau de chagrin permit aux révolutionnaires de l’an 2000 de ne plus créer qu’un Tribunal de Venys, compétent à tout égard.

Anaclet de Paxatagore