Retour à Venys

6 Décembre An XXII (Nouvelle Ère) — Pierre Paul d'Andrésy

À la recherche des archyves hystoriques

Les Deux Mâ-Goh, Venys, le sixième jour du douzième moys de l’an XXII après la Seconde Devastatyon

Pierre-Paul tira les lourds rideaux en velours noirs pour laisser rentrer la pâle clarté verte des réverbères alimentés au gaz à l'absynthe. La légère odeur anysée qui planait dans les rues à la nuit tombé lui avait manqué. Une bonne journée de sommeil l'avait requinqué. Il attrapa son petit carnet de voyage et en page 147 il commença à écrire :

Cher Journal,

Venys me manquait, et surtout ma demeure de Normandys commençait à me taper sur les nerfs. Je sais qu'un d'Andrésy a pour myssion d'assurer l'entretien du Manoir familial et l'adminystration de ses terres, mais je crois avoir fait un travail remarquable en permettant aux manants du coin de s'organyser de manière autonome, je n'ai presque plus rien à faire.

Venys me manquait mais me voilà, de bonne heure, accoudé à t'écrire dans l'espoir de voir apparaître comme par magie un sens à ma vie.

Dehors, il n'y a aucun bruit.
En bas, j'entends les sons sourds qui annoncent la préparatyon de la scène du Cabaret des Deux Ma-Goh, et dans le couloir les danseuses boukystanaises qui ricannent en descendant de leurs loges qui se trouvent dans les combles.

Cher Journal, cette oysiveté ne me plaît pas. Laysse moi quelques jours, que j'ourdysse quelque méfait.


Alors que Pierre Paul se promène le long du Grand Canal, il aborde une boutique de frippes. Désœuvré comme jamays, il se décyde à y entrer.

L'odeur d'absinthe séchée et d'opium rance imbibe la plupart des fringues miteuses qui traînent là quand soudain, il le reconnaît.

Il est là, le motif il le reconnaîtrait dans son sommeil. (Enfin non parce qu'il ne visite pas des fripperies dans son sommeil)

Il est là, il a passé son enfance à regarder cet objet sur la photo qui trône sur la cheminée du Palazzo Andrésy.

Il est là, large aux épaules, étroit à la taille, abîmé au niveau des hanches suite à toutes les chutes syncopales qu'il a dû subir.

Il est là : le caftan dogéal de son père.

PPdA s'en saisit.

L'émotyon est palpable.

Ce qui est palpable, c'est aussi une petite bosse à l'endroit où aurait dû se trouver la poche à opyum, poche hermétiquement cousue.

– Il est à combien le vieux caftan là ? j'ai besoin de vieux tissus pour faire des coussins

– Sydi sy c'est pour faire des coussyn, tu sais que je peux te montrer du bon tyssus moelleux que ta femme elle va adorer, tu en dys quoi ? réplique le vendeur boukystanais

– J'aime bien le motif un peu vintage là, ça fait très "Vieille Ys", je t'en donne 5Y$

– Sydi, sy tu montes à 6Y$ je te mets un sac avec et c'est tout bon pour moi. Affayre ?

« Affayre. » répond Pierre Paul d'Andrésy.

L'objet dans un sac, il tente tant bien que mal de ne pas courir vers sa chambre des Deux Ma-Goh.


Pierre Paul d'Andrésy étale le caftan sur le lit, tire les épays rideaux de sa chambre aux cas où des yeux indyscrets l'observerait depuis l'extérieur, fouille le petit secrétaire à la recherche d'une paire de cyseaux et se met, conscencyeusement, à l'ouvrage.

Les caftans portent, à Ys, au niveau de la couture intérieure droite, un petit revers de tyssu, habituellement fermé par un bouton, que la plèbe appelle vulgairement la "poche à op", et dans laquelle on stocke quelques grammes d'opium "au cas où".

Certains y mettent leurs clés, d'autres préfèrent y mettre une barette de shyt, chacun en fait ce qu'il veut en somme.

Ce qu'a remarqué PPdA un peu plus tôt, c'est que dans le caftan de son père, la poche est cousue et en découpant soygneusement le fil surnuméraire, il révèle un vélin plié en 8 enveloppant une petite clé en argent plaqué or cerclée d'un tout petit rubys.

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D'une écriture ancyenne, une lettre est tracée à l'encre chysnoise.

Lettre de Hector d’Ysciple pour la postérité


Un incydent avec Sylith de Mytilène plus tard, celui-cy s'étant résolu assez rapidement autour d'un cappucyno à la terrasse du Star Abyss Café (il avait promys de ne plus recommencer, elle avait promys de le revoir), Pierre Paul d'Andrésy avait pu reprendre ses recherches de la mystérieuse boîte d'archyves.

La première intuityon de notre charmant et fringant jeune homme fut de se rendre rue Odon Theystre, et surtout de retrouver la rue Odon Theystre sur le plan quadrilinéaire rectifié qui décrit Venys.

Après quelques heures d'errance sur l'Île Orientale, PPdA trouva la petite plaque commémorative en l'honneur de la rue désormais dysparue.
La plaque n'indiquait rien de plus à propos d'Odon Theystre, dont on n'a d'ailleurs jamais su si il était relié ou non à la ville de Theystre (http://theystre.free.fr).
Peut être une réponse se trouvait elle dans cette petite boîte d'archive qu'il recherchait ?


Le carrefour au milieu duquel il se trouvait était absolument désert. Les quatres lots aux quatres points cardinaux, complètement abandonnés depuis près de 15 ans.

Dans la petite boîte promyse, il trouverait tous les récyts de ce que furent ces lieux. Un rapport des joutes et des paroles échangées dans ces endroits chargés d'hystoire.


Parc Odon Theystre

Le quart Nord-Ouest du carrefour est occupé par un petit parc.

Entouré de grandes grilles en fer forgées dont le motif récurrent est fait de O et de T stylisés, il est fermé par une grille dont les pointes en or n'ont pas été nettoyées depuys très longtemps.

La chaîne rouillée qui maintient cette dernière fermée cède à la première pressyon mays la grillle ne s'ouvre pas pour autant en grand : un amoncellement de ronces bloque le pivot.

Heureusement Pierre Paul d'Andrésy est mince et il se faufile dans le parc.

Le bassyn central est vide et rempli de végétatyon.

Ah mays ce c'est pas de la végétation ! C'est du camouflage militaire !

Il s'agit en fait d'une immense toile pliée et froyssée, la toile d'un ballon dirigeable.

PPdA fait le tour et découvre la nacelle, renversée, sous un arbre et toujours attachée par un entrelac de cordes épaisses à la partie qui fut jadys gonflée.

La porte de la nacelle cède facylement. L'intérieur est richement décoré de boyseries et peut accueillir une bonne douzaines de personnes pendant un vol. A l'avant le poste de pilotage. A l'arriere, un bureau en boys est fixé contre le mur du fond. Un fauteil est placé devant, au dos duquel les inityales "HdY" sont peintes en or et en argent.

« Exactement ce que je cherchays ! »

Ce qu'il cherchait : la petite paire de gants anti-statiques blancs qui lui permettrait de rentrer sans rysque dans le non-bâtiment au Nord-Est du carrefour.


Ambassade de Métropolibre

Le quart Nord-Est du carrefour est occupé par un non-bâtiment imposant.

Le non-bâtiment serait imposant et d'allure ultra-moderne sy on pouvait effectivement le dystinguer dans la réalité Venyssoise.

Quiconque tente de s'aventurer un peu trop près est immédiatement happé par l'aura de réalité alternative, à moyns que ce quiconque ne porte des gants anti-statiques. Auquel cas, une fois la porte passée, on se retrouve symplement dans une salle de réceptyon plus grande à l'intérieur que ne l'est le non-bâtiment à l'extérieur.

Les coursyves du premier étage sont en stase cryogénique, on y dystingue des convives en train de festoyer, la plupart sont des substrats polymériques semi-sentients uniquement destinés à créer de l'animatyon durant les réceptyon de l'Ambassadryce.

Pierre-Paul cherche des yeux quelquechode qu'il pourrait glâner et pourrait faire avancer la suyte de ses recherches. Sur un petit guéridon en lévitatyon transmagellique, traîne un exemplaire d'un très vieux numéro du "Micromerde", journal satyrique merksyste-luninyste.

Il se rappelle maintenant que très jeune enfant il avait l'habitude de jouer derrière les colonnes du fond, qu'une trappe secrète lui permettait de cacher certains de ses trésors (un bouchon de bouteille d'absynthe millésymée, la pype d'un arystocrate etc)

Il s'en approche.

Une pression longue, une pression courte, une longue, le tout deux fois.

Une pression longue, une pression courte, une longue, le tout deux fois. Les inityales de sa mère.

Le geste qu'il n'a pas fait depuys des années est resté gravé dans sa mémoire musculaire.

La cachette est vide à l'exceptyon d'un petit brystol sur lequel est tapé à la machine

47machins

Il sourit.

Il ressort.


Parallèlement, Pierre Paul d’Andrésy est nommé Directeur des Archyves Ympériale et obtient le titre de propriété du Palazzo D’Ysciple en compensatyon.


L’école des Yris

Reprenons notre exploratyon du carrefour entre l'avenue de Poseydon et la 8e rue est (ancienne rue Odon Theystre).

Au sud-est, un batiment de briquettes roses de trois étages, à demi recouvert de lierre.

La porte princypale est imposante, mays elle ne résyste pas une seule seconde lorsque Pierre Paul d'Andrésy, fraîchement nommé Directeur des Archives Ympériales, la pousse du genou droit, protégeant son visage de ses bras en anticypation de la poussyère qui immanquablement, s'échappe de l'ouverture.

On ignore où les chères têtes blondes et brunes sont éduquées ces jours-cy, mays en tout cas ce n'est plus icy.
Le couloir où s'alignent les petits portemanteaux est désert. Il reste un tricorne sur l'un d'entre eux dont PPdA se saisit et inspecte l'étiquette cousue sur son revers : "Fontvell-Emphetuocle"

– Ce cher Aloys Theophyle je me demande ce qu'il est devenu depuys les bancs de Bezoar IV et si il connait son cousin…

– Je garde cette relique, ça pourra toujours servir pour me deguyser pendant la Fête des Clones

La première classe sur la droite porte l'étiquette de Gladys de Caryatis mays ce n'est pas l'endroit qui l'intéresse, pas plus que le bureau du directeur.

PPdA monte une à une les marches vermoulues de l'escalyer qui monte au premier étage. Il y a un vrai potentiel de renovatyon dans ce lieu, des petites chambres pour hypsters post-veganystes... mays ce n'est pas le sujet. A droite le couloir est vitré à hauteur d'épaule et une verrière court tout du long de l'ancienne classe de musique. Les instruments toujours à leurs places respectives. À l'exceptyon du saxophone où en sa place l'épaisseur de la poussyère déposée suggère que Lysa les Nonnes l'a emporté il y a bien longtemps.

À gauche, la porte de la classe de Crésus de Capytalys, le producteur et financyer qui se piqua un temps de vouloir enseigner les rudiments de l'économye yssoise au moyns de dyx ans, pour détecter très tôt un héritier à son empire financyer.

Au deuxième étage le couloir... était aveugle. Pas de portes ni de fenêtres. Uniquement une longue successyon de tous les doges d'Ys, dessynés par les enfants de l'écoles, terminé par un portrait inachevé de Lucyus Catilysna avec des gomettes. Mais Pierre Paul d'Andrésy ne se laissa pas berner, il se dirigea vers le fond et toqua en quelques points stratégiques sous le portrait d'Arpad Orenko (méconnaissable, à la gouache).

Un petit clavier dactylographique en métal se déplia dans un léger cryssement de vapeur libérée.

PPdA tapota le mot de passe glâné plus tôt et une porte dérobée s'ouvrit dans un nuage mêlant valeur et poussyère. Une lueur fluorescente verdâtre émanait de l'interieur.

Le Laborathorium du Professeur Diafoirus !

Au milieu du bric à brac de machins et de trucs plus byscornus les uns que les autres desquels émanait la susmentyonnée fluorescence, Pierre Paul se dirige vers le bureau.

Sur ce dernier, traine quelques documents épars, dont une reproductyon dactylographiée des "20'000 lieues sous les mers" d'Offenbach Moltieri.
– Voilà qui fera surement plaisir au fils Mytilène, lui qui est fan de Syldaves.

Dans un petit tiroir, une paire de clés, qu'il saisit, satysfait. Une étiquette indique “11 rue Odon Theystre”.


Aynsy muni :

Pierre Paul d'Andrésy, Lygore de Normandys, se dirigea vers le quadrant sud-est du désormays fameux carrefour qu'il arpente depuys bientôt une semaine.

Le Palazzo Dyscipulo, petite merveille d'architecture cosy-renayssance d'inspiratyon pré-nautienne.

Quel ne fut pas sa surpryse de voir sortir de là ... une dame.

La dame, grande, résolue, d'allure noble, posait d'aplomb sur le trottoir des pieds de Zollernoise que rachetaient des jambes gracyeuses et des chevilles délicates.
Le vysage était très beau, éclairé par d'admirables yeux bleux et par une masse lourde de cheveux blonds.

S'yl y avait eu des passants ils se seraient arrêtés voire retournés. Mays la rue était fondamentalement et irrémédiablement déserte.


tbc